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LĠÎUVRE LITURGIQUE DE GOUDJI

Par Bernard Berthod
Conservateur du MusŽe de Fourviere
Consulteur de la Commission pontificale pour les Biens culturels de lĠEglise

Ç Ma premire rencontre avec Dieu a lieu, ˆ lĠ‰ge de treize ans quand, pour la premire fois de ma vie, je rŽussis ˆ pŽnŽtrer dans une Žglise en GŽorgie, en dŽjouant la vigilance des gardes komsomols qui en interdisaient lĠentrŽe aux jeunes. Lˆ, je vis une fresque reprŽsentant le Christ marchant sur leseaux du lac de TibŽriade. Cette vision totalement surrŽaliste pour le jeune garon non initiŽ que jĠŽtais, provoqua en moi le dŽsir fou et la volontŽ de comprendre.Pour cela, il fallait acquŽrir des connaissances que je nĠavais pas. Ds lors, ma soif dĠapprendre ne connžt pas de limite. Bien que vu dĠUnion SoviŽtique,mon dŽsir de rŽaliser des objets de culte paraissait invraisemblable ; aprs mes Žtudes aux Beaux-Arts de Tbilissi,jĠeus trs jeune la conviction quĠil me fallaitcrŽer, de mes propres mains, des objets uniques, en aucun cas reproductibles, dans un matŽriau noble pouvant dŽfier le temps, des objets de beautŽ, ˆ la gloire de DieuÈ

 

.1. GƒNƒRALITƒS

Ç Des objets de beautŽ, ˆ la gloire de DieuÈ, cĠest ainsi que Goudji conoit sa crŽation. Il rŽussit ˆ renouveler le matŽriel liturgique tout en lĠinscrivant dans lĠHistoire et la Tradition. Par la simple pensŽe de faire du beau pour Dieu, avec des matŽriaux nobles. Humaniste et homme de deux cultures, il comprend, aprs son installation en France, lĠuniversalitŽ du catholicisme. Il sent lĠ‰me profonde et le gŽnie propre de lĠEglise de Romesi diffŽrente des Eglises byzantines mais Žgalement sÏur.Ses principales sources dĠinspiration sont palŽochrŽtienne et mŽdiŽvale. A cela sĠajoute une Žcoute attentive du commanditaire. Son Ïuvre est par essence symbolique. Chaque pice forme un pome dĠorfvrerie o les mŽtaux, les pierres, les couleurs et le bestiaire entrent en symbiose pour exprimer une pensŽe. Les couleurs ne sont pas choisies par le hasard esthŽtique. La blancheur de la nacre indique la virginitŽ de Marie, le rouge du jaspe la passion et lĠeucharistie, le vert lĠespŽranceet le vestiaire Žpiscopal. Sous les doigts de lĠorfvre, le bestiaire chrŽtien est revisitŽ par lĠorient caucasien. LĠaigle et la colombe en sont les ŽlŽments majeurs. LĠaigle que lĠon trouve sur les ambons et les pupitres reprŽsente la rapiditŽ de la diffusion de la parole de Dieu ˆ travers le monde. La colombe est utilisŽe pour reprŽsenter le Saint Esprit ; souvent elle est transformŽe en rŽserve eucharistique, elle prte alors son corps, signe de lĠinnocence et de la simplicitŽ, comme abri pour les saintes espces ; ˆ Chartres, Goudji en fait le rŽceptacle de lĠencens. Les gemmes ench‰ssŽes ne sont pas seulement dŽcoratives. Les douze pierres, citŽes par saint Jean dans lĠApocalypse, comme fondement de la JŽrusalem cŽleste, sont des constantes: le jaspe, le saphir, la calcŽdoine, lĠŽmeraude, la sarde, la chrysolite, le bŽryl, la topaze, lĠhyacinthe, lĠamŽthyste, lĠagate et la chrysoprase.

.2. GRANDES RƒALISATIONS ET SANCTUAIRES

De lĠobjet, Goudji passe naturellement au sanctuaire, rejoignant la prŽoccupation des grands architectes, en particulier ceux du XIXĦ sicle, comme Viollet-le-Duc, qui dŽsiraient que tout soit en harmonie, le mobilier et lĠimmobilier.Cependant, lĠartiste ne trouve pas cette harmonie par plagiat ou intŽgration stylique, mais, aprs sĠtre profondŽment imprŽgnŽ de lĠesprit de lĠŽdifice, en donnant imperceptiblement ˆ son art qui reste le sien, la note, le ton qui intgrent ses Ïuvres dans un lieu donnŽ. Il opre ainsi une rŽappropriation du sanctuaire par une prise
en compte du volume et de lĠhistoire du lieu dans une mise en scne globale.

Goudji est sollicitŽ par Franois Mathey, conservateur en chef du musŽe des Arts dŽcoratifs de Paris, pour prŽsenter quelques Ïuvres lors de lĠexposition organisŽe par le ComitŽ National dĠArt SacrŽ, ˆ lĠabbaye de lĠEpau. Il crŽe une cuve baptismale avec lĠaiguire et un chandelier pascal qui sont ensuite dŽposŽs ˆ Notre-Dame de Paris.
  • Notre-Dame de Paris
Goudji est approchŽ pour le rŽamŽnagement du sanctuaire de la cathŽdrale de Chartres. Entre 1992 et 1996, il conoit en collaboration avec lĠŽvque, Mgr Jacques Perrier, vint cinq pices aujourdĠhui inscrites ˆ lĠinventaire du Patrimoine franais ; la pice centrale est lĠautel majeur et sa parure, croix, calice, patne, burettes, auxquels sĠajoutent la reliure de lĠŽvangŽliaire, les siges de lĠŽvque et des assistants, lĠambon, la colombe eucharistique et la croix reliquaire.

 

  • Sanctuaire de la cathédrale de Chartres
  • Luon
En 1995, lĠŽvque de Luon, Mgr Franois Garnier, le sollicite pour rŽaliser le nouvel autel majeur de sa cathŽdrale, le sige Žpiscopal, lĠambon, le calice . Žpiscopal, la patne et la croix dĠautel
  • La Grande Trappe
  • Tournus
  • Saint-Pierre sur Rh™ne
  • Cambrai
  • Ecole du Bienheureux Daniel Brottier

3. VASES SACRƒS ET CROIX PROCESSIONNELLES

Les objets du culte eucharistique sont en contact avec le corps vivant du Christ, aussi Goudji les traite-t-il avec une rŽvŽrence infinie. Ce sont le calice, la patne, le ciboire et lĠostensoir. La coupe ou la surface recevant le pain eucharistique sont en argent dorŽ ou en or, suivant les prescriptions de lĠancien Ordo missae.Mais cĠest surtout dans le traitement de la croix qui lĠon retrouve lĠiconographie byzantine ; celle-ci est toujours reprŽsentŽe glorieuse, en or ou gemmŽe ˆ lĠimage de celle que Constantin a ŽlevŽe sur lĠAnastasie de JŽrusalem et non comme le bois dŽcharnŽ du supplice. Lorsque le Christ est figurŽ sur lĠinstrument de la rŽdemption, il nĠest pas souffrant mais glorieux et dŽjˆ ressuscitŽ, vtu dĠune longue robe et couronnŽ dĠor.

Calices

Ciboire

Ensemble avec burettes et plateau

RŽserves eucharistiques

Ostensoir de Lourdes

Croix processionnelles : Sacristie pontificale, Grande Trappe, Tournus, Cambrai puis bientôt Fribourg

4. RELIQUAIRES

Avec les reliquaires, cĠest lĠaffrontement avec la matire. LĠapproche et la conception dĠun reliquaire sont autres que celle dĠun vase sacrŽ. Dans le premier cas, il faut crŽer un rŽceptacle qui va recueillir le corps vivant du Christ ; dans lĠautre, il sĠagit de conserver les restes humains bien misŽrables dĠun mort. Restes, il est vrai, vŽnŽrŽs par la communautŽ des fidles, mais cependant poussire dĠhumain non encore transfigurer par la rŽsurrection.  CĠest comme lieu dĠattente de la RŽsurrection que Goudji conoit les reliquaires qui lui sont confiŽ. Lieu dĠattente, ils sont sobres mais applent ˆ la vie Žternelle.

 

Padre Pio

St Philibert de Tournus

Sept-Fons

Alain de Solminihac à Cahors

5. CHAPELLES ƒPISCOPALES PONTIFICALIA.

Les pontificalia sont les insignes pontificaux propres au prŽlat, Žvque ou abbŽ avec lesquels il exerce sa mission pastorale. En orfvrerie, ce sont la crosse, la croix pectorale, lĠanneau, lĠaiguire et le bassin, lĠampoule de saint chrme, le bougeoir et pour les archevques mŽtropolitains, les Žpingles du pallium. En abordant les pontificalia, lĠorfvre doit marquer le mieux possible la personnalitŽ du rŽcipiendaire. LĠinspiration nĠest pas contrecarrŽe, mais potentialisŽe par la commande. Les qualitŽs et lĠhistoire du prŽlat entrent en ligne de compte.

Pour Jean Paul II

Formal
Ces douze pierres prŽcieuses assemblŽes paraient lĠŽphod du grand prtre juif ; on les retrouve, au Moyen Age, sur le rational de lĠŽvque et dans la bourse pourpre suspendue ˆ la ceinture de soie rouge du pontife romain

.Marteau de lĠAnnŽe Sainte

Crosses : Žpiscopales :Mgr Brugus ; Mgr Giraud ; abbatiales : Clervaux, Triors, Champagne

 

Croix pectorales

Anneau épiscopal
Ampoules ˆ Saint-Chrême

 

6. OBJETS VARIƒS
Colombe de la TrinitŽ, Vend™me

BIBLIOGRAPHIE :

S. Barsacq, B. Berthod. Goudji, Paris, LĠAmateur, 2002.
B. Berthod, E. Hardouin-Fugier, Dictionnaire des arts liturgiques, XIX Ħ - XXĦ sicle, Paris, LĠAmateur, 1996, pp. 16, 53, 268-270, 388-389.B. Berthod, Ç Des Ïuvres dĠart pour la gloire de Dieu È, Osservatore romano, Rome, 11 mai 1999, pp. 3-4.
B. Berthod, E. Hardouin-Fugier, Dictionnaire iconographique des saints, Paris, LĠAmateur, 1999, pp. 37, 272, 317.
B. Berthod, P. Blanchard, TrŽsors inconnus du Vatican, cŽrŽmonial et liturgie, Paris, LĠAmateur, 2001, pp. 52, 90, 196 et 232.
L. Delhomme, Ç La cathŽdrale de Luon, le mobilier du chÏur de 1770 ˆ 1995 È, Arts, recherches et crŽations,  nĦ 3, 1995, pp. 57-65.
M. HŽrissŽ, Goudji, Paris, LĠAmateur, 1993.

 

 

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